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Abondance de l’élément aquatique chez Tarkovski

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Abondance de l’élément aquatique chez Tarkovski

Eid Kanaan Atallah) [1](

DEPARTEMENT d’AUDIOVISUEL
Faculté de Beaux-Arts
Holy Spirit University of Kaslik (USEK)
P.O. Box 446, Jounieh, Lebanon

Préparé par
Eid N. KANAAN-ATALLAH
eid.n.kanaanatallah@net.usek.lb
+9613557542

Mots clés

Tarkovski, Gaston Bachelard, élément aquatique, eaux printanières, eaux claires, eaux profondes et obscures, eau symbole maternelle.

Résumé

Le philosophe français, Gaston Bachelard approfondi son étude sur l’élément aquatique et l’analyse en associant les eaux profondes et obscures à la mort, les eaux jaillissantes à la vie, l’eau au personnage mythologique de Narcisse, les eaux claires aux notions de beauté, d’amour et de fraîcheur, l’eau au miroir. Similaire a Bachelard, Tarkovski traite cet élément comme une matière principale dans ces réflexions et dans la totalité de son œuvre. L’eau est omniprésente dans tous les films de ce réalisateur Russe, il ne peut pas concevoir son monde cinématographique sans l’eau comme matière première. Il film en détail l’élément aquatique suivant ces différents formes; eau stagnante, jaillissante, eau sombre ou transparente…

Introduction

Selon le grand philosophe français, Gaston Bachelard, il existe deux forces imaginantes, deux types d’imagination, qu’il nomme respectivement « l’imagination formelle et l’imagination matérielle. » (Bachelard, 1942, p. 7) La première, « l’imagination formelle », est la transformation de sentiments, de ressentis, en formes, notamment les mots, qui représentent autant de signes variés pour traduire une idée. Quant à la deuxième, « l’imagination matérielle », elle résulte des « images directes de la matière » (Bachelard, 1942, p. 8), qui sont autant d’images palpables, visibles, audibles, qui se rattachent à la matière même de ce qu’on perçoit, donc aux cinq sens et aux quatre éléments.

En effet, Bachelard avance que si l’imagination se focalise sur un élément en particulier, c’est sans doute dû à une sorte d’histoire ancienne, à des sentiments déjà éprouvés et des expériences vécues, dans « un rêve souvent rêvé » (Bachelard, 1942, p. 11), dans le cadre de ce qu’il appelle le « pays natal [qui] est moins une étendue qu’une matière; c’est […] un vent ou une sécheresse, une eau ou une lumière. C’est en lui que nous matérialisons nos rêveries; c’est en lui que notre rêve prend sa juste substance. » (Bachelard, 1942, p. 15)

L’élément aquatique, quasiment omniprésent dans l’œuvre de Tarkovski, pourrait ainsi être le fruit de certains souvenirs du cinéaste, une réminiscence de son « pays natal », de la matière même de ses souvenirs et de ses rêves.

L’omniprésence de l’eau dans l’œuvre de Tarkovski est un sujet d’étonnement. Elle apparaî)t comme un élément polysémique, qui touche le plus souvent l’oreille, avant d’être vue. L’écho d’une goutte insistante, le ruissellement d’un rideau de pluie, l’avancée inexorable d’une flaque sur un sol carrelé, les filets d’eau sur des chevelures mouillées, le miroir rond d’un baril rempli d’eau dans laquelle se reflète la lumière, les fleuves, les lacs et les rivières: sous toutes ses formes, l’eau est présente dès les premiers plans des films. (Bergé, 2011, §3)

Bachelard déclare que les eaux printanières des fontaines et des ruisseaux, qui coulent allègrement, avec légèreté et fraîcheur, et qui miroitent au soleil, sont autant d’eaux claires dans lesquels peuvent se refléter les images, les visages. Elles jouent ainsi souvent le rôle d’un miroir.

Le philosophe associe d’ailleurs ces eaux-là au personnage mythologique de Narcisse, jeune homme d’une grande beauté qui, un jour qu’il s’avançait pour boire au-dessus d’une source, surprit son reflet dans l’eau et en tomba éperdument amoureux. Il passa alors ses journées à contempler son image dans ce miroir naturel. Déçu de ne pouvoir assouvir cette passion, il finit par mourir.

Par cette allusion directe au mythe grec, Bachelard associe les eaux claires, d’une part, au miroir, et d’autre part, aux notions de beauté, d’amour et de fraîcheur.

Miroir, l’eau devient ainsi source d’interrogations diverses, liées notamment à la psychanalyse: «Pour qui te mires-tu ? Contre qui te mires-tu ? Prends-tu conscience de ta beauté ou de ta force?» (Bachelard, 1942, p. 31) Nous nous retrouvons alors face à la manifestation de la volonté de «paraître» de l’être, ou même de la nature, qui, elle aussi, voit son ciel, ses arbres, se mirer dans ses eaux. Or, «contrairement au reflet stable que donne le miroir, le reflet aquatique, vague, instable, ouvre la voie à l’idéalisation.» (Pichon, 2015, p. 5) L’eau miroitante, quoique réfléchissante, n’est donc pas un miroir fidèle. C’est bien le lieu de toutes les imaginations, de toutes les cristallisations. L’image reflétée devient ainsi porteuse de toute la subjectivité de l’observateur, de son ressenti, de ses désirs.

Par ailleurs, les eaux claires sont fortement rattachées aux valeurs du mythe narcissique, comme nous l’avons vu plus haut. Elles se font ainsi, d’abord, le symbole de l’amour – celui que Narcisse se porte à lui-même, mais aussi celui qu’on peut porter à la beauté; ensuite, le symbole de la beauté – celle parfaite de Narcisse, mais également celle, encore plus parfaite, de la nature; et enfin, symbole de la jeunesse, de ce que Bachelard souligne comme étant la «fraîcheur […] [qui] est une force de réveil […] [qui] valorise toute la saison du renouveau.» (Bachelard, 1942, pp. 42-43)

Parallèlement à ces eaux légères, printanières, source de vie et de beauté, il existe des eaux plus troubles, porteuses d’obscurité. En référence à la psychanalyse et plus précisément à la première (1900) et à la deuxième topique de Freud (1920), ces eaux noires pourraient être considérées comme l’équivalent du Ça, donc de l’Inconscient, qui crée nos pulsions et contient nos désirs refoulés, indicibles, notre partie «obscure», chaotique, immorale.

Bachelard, pour sa part, associe ces eaux profondes et obscures à la mort, allant même jusqu’à les qualifier d’ «eau morte. […] L’eau est le véritable support matériel de la mort.» (Bachelard, 1942, p. 78) Cette association, due à la couleur-même de cette eau, a bien d’autres raisons aussi. En effet, nous sommes là face à une eau dense, lourde, parce que «riche de tant de reflets et de tant d’ombres» (Bachelard, 1942, p. 70), une eau qui peut couler, certes, mais comme avec difficulté, une eau à la limite du visqueux, une eau opaque, aussi mystérieuse que la mort. De plus, il s’agit souvent d’une eau silencieuse, dont le mutisme même est signe certain de la mort: si la vie est bruyante, vibrante de mots, de rires, de froissements et de bruissements, la mort, elle, signifie la fin de ces sons, de ces preuves de souffle, elle est bel et bien le silence qui s’impose.

Et justement, dans la même suite d’idées, cette eau funeste peut rapidement être associée au liquide, tout aussi universel, qui coule dans les veines de l’homme: le sang. Or, cette association se fera souvent d’une manière indirecte, sous-entendue. En effet, l’artiste peut ne pas montrer clairement cette équivalence mais bien la suggérer. Ainsi, dans les œuvres d’art,  « l’eau […] sera donc du sang innommé, du sang innommable. » (Bachelard, 1942, p. 74)

Ce qu’il est finalement intéressant de souligner par rapport à ces eaux profondes, c’est leur immense et incontournable mélancolie. «Ces eaux, ces lacs sont nourris des larmes cosmiques qui tombent de la nature entière.» (Bachelard, 1942, p. 77) Et ces larmes universelles symbolisent le temps qui passe, donc la vie qui s’en va, la mort qui approche. Porteuse du message funeste de la fin, preuve matérielle de cette inéluctable destinée, «l’eau est ainsi une invitation à mourir [puisque] le temps tombe goutte à goutte des  horloges naturelles.» (Bachelard, 1942, pp. 68-69)

Ainsi, les eaux sombres et profondes, qui sont d’ailleurs récurrentes dans les films de Tarkovski, «(eaux saumâtres, boues et marécages) engendrent le malaise, elles signifient le mal ancien qui ronge les bâtiments, le pourrissement des choses dans les puits abandonnés. Elles signifient les épreuves.» (Bergé,  2011, §3) Elles pourraient tout aussi bien porter bien des messages de l’inconscient, faits d’angoisses tues, de mélancolie indicible, de tragédie et de mort.

Face à ces eaux, claires et obscures, caractérisées surtout par leur «couleur », leur teinte, nous ne pouvons oublier la symbolique première de l’élément liquide, celle qui rappelle le monde utérin et assure, par là même, «le caractère fondamental de la “maternité” des eaux.» (Bachelard, 1942, p. 135)

En effet, Carl Jung (1950) voit dans la mer un symbole féminin de la renaissance, et le soleil qui s’y couche chaque soir serait à l’origine de cette symbolique. D’ailleurs, d’un point de vue plus concret, le fœtus baignant dans le liquide amniotique, premier liquide de la vie, met en avant cette eau féminine par définition, et ce, depuis la nuit des temps.

Or, l’eau symbole de la mère devient, naturellement, le symbole même de la vie. Cette idée est corroborée par une vérité scientifique: le caractère indispensable de l’eau à toute sorte de vie connue. Cette caractéristique est d’ailleurs reprise par bon nombre de penseurs, dans leurs diverses interprétations du symbolisme de l’eau, source et condition de vie, notamment par Jung lui-même.

Là où il n’y a pas d’eau, il n’y a pas de vie; là où il y en a trop, tout est noyé. C’est la tâche de la conscience que de choisir le lieu juste où l’on ne se trouve pas trop près de l’eau, ou trop loin d’elle; mais l’eau est indispensable. (Jung, 1950, p. 58)

Bachelard, pour sa part va voir dans l’eau, le symbole suprême de la mère, en l’associant au lait maternel. En effet, pour lui, l’eau devient «la boisson fondamentale, […] nourricière comme un lait, […] conçue comme l’élément nutritif. […] Avec l’eau ainsi maternisée […] l’élément liquide apparaît comme un ultra-lait, le lait de la mère des mères.» (Bachelard, 1942, p. 144) Eau et lait sont ainsi associés, par leur liquidité certes, mais également par leur caractère maternel, nourricier et vital.

Image féminine par excellence, l’eau des films de Tarkovski pourrait, dans certains cas, être associée à la mère, voire à la patrie – mère symbolique, refuge des temps primordiaux de l’enfance, retrouvé ou perdu à jamais.

Finalement, au-delà de l’image maternelle, l’eau peut revêtir une signification quelque peu religieuse, ou du moins spirituelle. En effet, cet élément est souvent considéré comme «la matière pure par excellence, la matière naturellement pure.» (Bachelard, 1942, p. 153) «L’absence de couleur, d’odeur, de toucher fait de l’eau un liquide intact, celui qui offre le symbole d’une idée supérieure, d’une perfection vierge, d’un objet sans corps étranger. Le mythe de la pureté […] sans souillure est une conviction intimement liée aux valeurs religieuses et morales.» (Hervé-Bazin, 2009, p. 40)

C’est dans cette optique que, dans diverses religions et croyances, l’eau est souvent associée à des rites de purification, de passage ou d’élévation.

Ainsi, dans la religion chrétienne, le sacrement du baptême se fait grâce à l’eau baptismale qui permet à l’être de se débarrasser de ses péchés pour entrer dans la chrétienté. Dans la religion musulmane, l’eau joue également un rôle de purification. En effet, le lavage rituel est obligatoire avant la prière: ce sont les ablutions purificatrices qui permettent à la personne de se débarrasser de toute souillure avant de communiquer avec Dieu.

Dans l’œuvre de Tarkovski, nous pourrons voir, à titre d’exemple, «l’eau comme signifiant du baptême et symbole de pureté, le verre transparent, métonymie de la lumière qui le traverse.» (Aumont, 2003, §31)

Forte en symboles, l’eau, aux multiples facettes, peut parfois se mêler aux autres éléments cosmiques, générant des significations nouvelles. C’est ainsi que, mêlée au feu, elle prend de nouveaux visages. Et «dans ces gouttes de feu, dans ces flammes mouillées, dans cette eau brûlée, comment ne pas voir les doubles germes d’une imagination qui a su condenser deux matières.» (Bachelard, 1942, p. 114)

Analyse

Quand on demanda Tarkovski à propos de l’abondance de l’eau dans ses films il répliqua que cet élément est une représentation directe de la nature, une réponse plutôt générale et ambiguë. Il dit aussi qu’il pleuvait fortement chez lui en Russie quand il était petit, et spécifia qu’il n’aimait pas la mer car elle est trop vaste et monotone, qu’il aimait les ruisseaux, les petites choses, et donna l’exemple des Japonais concernant la nature. Il ajouta que cette société se concentre sur un espace cloîtré mais qui reflète l’infini. Pour ce cinéaste l’eau est mystérieuse et rien n’est plus beau que cet élément. Il parla de certaines de ces propriétés physiques: ‘Elle est très ciné génique, elle transmet le mouvement, la profondeur les changements.’

On commence avec son premier film, Ivan’s Childhood, et on voit déjà, à deux minutes du métrage, l’enfant boire de l’eau du saut qui lui est offerte par sa mère. Elle lui donne cette substance essentielle, cette fois-ci, pour ravitailler son rêve, puisqu’on le voit, en un instant, passer de la nature libératrice au vieux moulin sombre et emprisonnant, en quelque sorte. On sent que son existence dépend de cette matière devenue indispensable pour le soutenir dans ce monde féerique; c’est comme le fuel qui alimente un moteur. L’eau devient un élément étrange.

Presque une minute plus tard, on aperçoit Ivan, en train de trouver un moyen de fuir dans l’eau des marécages. Elle est pour lui un espace neutre loin des yeux de l’ennemi, et un abri des obus. C’est aussi une frontière entre l’espace occupé par les Russes et l’espace dominé par les Allemands. Ce n’est pas seulement le lien, entre ces deux lieux, mais aussi un pont entre l’espace intérieur et extérieur des protagonistes. Comme lorsque Tarkovski met en valeur la surface de l’eau du puit, limite entre les songes d’Ivan et sa réalité, alors l’eau devient la connexion entre le monde du rêve et le monde réel. L’espace du puit, avec ces murs remplit d’eau, devient comme un cordon ombilicale, indispensable, car sans lui les deux espaces seront dissociés et isolés, et en conséquence sans valeurs. Gaston Bachelard explique que l’eau qu’il est un objet intérimaire: «L’eau est vraiment l’élément transitoire. Il est la métamorphose ontologique essentielle entre le feu et la terre. L’être voué à l’eau est un être en vertige.»[2] L’eau devient un élément autant étrange que transitoire.

L’importance de la présence de l’eau apparait encore (vers la treizième minute) lorsqu’on voit Ivan se baigner, après une journée mouvementée et avant de dormir, dans ce qui ressemble à une grosse marmite, dans le bunker. Assis à table, à peine avoir mangé une part du repas, on remarque qu’il s’endort rapidement. On peut aussi distinguer le son de gouttes d’eau qui coulent. Nous comprendrons la cause de ce bruit lorsque la caméra nous dévoile la main tendue de l’enfant endormi, d’où ruissellent les goutes pour tomber dans un récipient en aluminium. Tout de suite après c’est le passage dans un monde autre, le monde des songes. Comme si l’eau a permis qu’Ivan puisse dormir, et rentrer dans le monde des rêves; l’eau est l’élément essentiel pour cette transition, et qu’elle joue le rôle d’un catalyseur sans lequel on ne peut joindre ces deux mondes. Gaston Bachelard décrit le pouvoir d’une goutte d’eau:

Une goutte d’eau puissante suffit pour créer un monde et pour dissoudre la nuit. Pour rêver la puissance, il n’est besoin que d’une goutte imaginée en profondeur. L’eau ainsi dynamisée est un germe; elle donne à la vie un essor inépuisable.[3]

Un peu plus loin (16 ème min) on voit le garçon et sa mère, de face, en gros plan, et ensuite on perçoit le reflet de leur visage dans l’eau, au fond du puit. Cela nous rappelle le plan de la chambre de l’hôtel de Gortchakov dans Nostalghia. Ivan discute avec sa maman en admirant les profondeurs. On le voit toucher l’eau pour essayer de saisir l’étoile brillante. Le voilà qui se connecte corporellement à Ivan du bunker. La liaison est visible; l’eau de ce puit se métamorphose en une nouvelle substance qui a l’apparence du liquide ordinaire, mais le pouvoir de connecter deux mondes différents, l’intérieur et le rêve avec l’extérieur et le monde actuel.

Dans le plan suivant, l’enfant est au fond du puits en train de regarder vers le haut, voyant sa maman soulever le réceptacle rempli d’eau. On entend l’éclat d’une balle et on perçoit le foulard blanc voltiger en chute libre. I van pousse un cri de terreur, ensuite on voit la mère de garçon allongée sur son ventre par terre, morte. L’eau éclabousse et mouille la dame; tout se passe au ralenti. On remarque aussi que l’eau à l’intérieur du seau est opaque et noire, contrairement à sa nature transparente et limpide, indice de mort, ajoutant à cette matière un nouveau rôle fantastique, le pouvoir de joindre deux mondes distincts.

On voit aussi, après plus que quarante-deux minutes du film, le capitaine se laver le visage à côté du miroir; on détecte encore une fois ce besoin de toucher à l’eau, matière aussi magique qu’essentielle.

Passons maintenant à Roublev. Dès le début du film, nous assistons à une abondance d’eau entourant la chapelle; cette présence est bien évidente. L’angle de vue, en plongé, met encore plus en valeur cet élément, que nous discernons lorsque le personnage, attaché à une montgolfière, est en train de survoler tout le paysage. Tarkovski filme explicitement l’eau au sol, et non le ciel; le plan est saturé par des espaces d’eau. Ce passage se termine avec l’acteur, coincé dans le ballon dégonflé, tombant auprès d’un marécage.

Quelques minutes plus tard, on témoigne une abondance des scènes pluvieuses torrentielles, que l’on peut repérer remarquablement, tout le long du film. Par exemple, après plus de huit minutes du métrage, les trois protagonistes traversent un champ de blé dans un temps orageux, avant de gagner leur destination. On voit aussi, vers la douzième minute, le comédien Skomorokh se tenir torse nue, sous la pluie, en continuant à divertir ses compagnons. Finalement, dans la dernière scène, on aperçoit quatre chevaux brouter l’herbe sous l’averse.

Il est nécessaire de signaler, les diverses scènes en gros plan sur l’eau, comme le pinceau et la peinture, qui se dissolvent dans le flot courant au bord du fleuve. Notons aussi que la majorité des plans se déroulent à proximité de l’eau. Par exemple, lorsque les gens se baignent nu dans l’eau du fleuve avec des flambeaux à la main, performant une forme de rituel sacré. On aperçoit aussi la femme se débarrassant de sa tunique et plongeant nue dans l’eau pour fuir les autorités. Elle est passée à côté de la barque de Cyril. Et pour finir, c’est la marche des chevaliers partant à la guerre, et la caméra nous révèle les sabots des chevaux galopants dans l’eau.

Quant à Solaris, il comprend des plans où l’eau coule, dans des emplacements irrationnels. Dans le plan de la toilette (01:44:18) la caméra bouge vers le côté à droite de l’image. On voit alors le visage de Hari, et derrière elle on remarque des gouttes d’eau en train de tomber. Ce qui est absurde dans cette scène, c’est qu’il y a une baignoire mais personne n’est en train de se baigner. Ceci contribue à la création d’une atmosphère délirante. L’eau ne coule pas où elle est sensée dégoutter, ni quand il le faut. La mutation des fonctions de cet élément est claire.

D’autre part, c’est du bon sens que la maison soit conçue dans le but de protéger les habitants du danger ainsi que des éléments de la nature comme le vent, le froid, la pluie, etc… Chez Tarkovski ce concept est inversé. Il pleut dans la maison, l’eau coule sur les murs, le sol est inondé, le toit est ruisselant. Il semble aussi que les personnes habitants cet espace sont complètement adaptés, et même insouciants de cet état, comme si ces conditions morbides étaient acceptées car assumées normales.

Vers la fin de Solaris on voit le père de Chris dans la maison (02:43:17). Il cherche un livre, sous une pluie inhabituelle qui tombe du plafond. La buée se dégage de sa jaquette mais lui ne s’en inquiète pas. On voit qu’il pleut surtout sur le père et non dans tout l’espace. La constitution de cette eau qui descend du toit de la maison n’est pas cohérente; elle est changée en une matière étrange, puisqu’elle se transforme en vapeur, dès qu’elle touche au père de Chris, comme s’il était si chaud qu’il est capable de permettre à cette goutte froide de s’évaporer.

En observant aussi la planète elle-même, on découvre qu’elle est formée d’eau qui, par nature, change de couleur et de forme continuellement. Vers la seizième minute, le plan nous révèle un espace stagnant qui se transforme, peu à peu, en eau tourbillonnante, effervescente. Plus loin, on découvre un espace d’eau effervescente et rougeâtre, sous un ciel qui semble embrasé. Plus tard, c’est une eau de texture presque boueuse et en ébullition, de couleur dénaturé. Vers une heure et quarante-neuf minutes, elle devient un mélange jaunâtre et bleuâtre, et le mouvement du flot parait hypnotisant. Après deux heures et treize minutes du film, les ondes sont de nouveau rougeâtre et en bouillonnement. Et vers la fin, Chris observe par la fenêtre une étendue avec cet effet de tourbillonnement qui domine et une couleur bleuâtre assombrie.

Un dernier effet dans cet œuvre, proche de la finale, que nous allons signaler, c’est ce pouvoir d’immobiliser le temps, qui est révélé à travers le mouvement des algues, qui semblent touchés par l’apesanteur; on voit tout se passer au ralenti.

Dans Mirror, l’étrange abondance de l’eau est très notable. La jeune femme Lisa est en train de courir dans les allées de l’usine sous la pluie torrentielle, mais après un petit instant elle arrête de courir, et devient insouciante de la possibilité de se tremper; l’eau devient sa seconde nature. Un peu plus tard, elle prend une douche dans la toilette de l’usine; elle prouve un besoin d’être en contact avec cet élément fantastique.

L’eau, hors son contexte habituel, rend l’espace anormal. Cette manifestation se produit plusieurs fois dans les films de Tarkovski. A la dix-huitième minute dans Mirror, on voit la maison où la mère de l’enfant est en train de laver ses cheveux dans un bol d’eau. Toute mouillée, elle se lève. La caméra se retire et on découvre une chambre accidenté ou l’eau tombe du toit et sur les murs pour atteindre le sol également inondé; une désintégration totale se passe devant nos yeux. La femme se déplace dans cette maison, et on aperçoit de nouveau l’eau ruisseler sur les murs et sur les plafonds de toutes les chambres.

Un autre plan, similaire à celui d’avant, montre la femme du docteur qui demande à Maria, la mère de l’enfant, de décapiter le coq[4]. On la voit en gros plan avec sur les lèvres un sourire rictus, puis elle fixe la caméra avec une expression satanique. Elle est sous une lumière d’une source dure qui est administrée par un éclairage diabolique. On perçoit alors une femme effrayante. Sur le mur, illuminé à moitié, derrière elle, on aperçoit l’eau ruisseler; on est dans le monde intérieur de la mère. L’eau coule sur les murs à l’intérieur des maisons. Notons que ce phénomène se produit, non seulement dans Mirror, mais dans plusieurs autres films.

Le plan de la toilette de l’usine[5] dans ce film est bizarre. La douche est le milieu habituel où l’on voit l’eau en train de s’écouler sur les murs et sur le sol. Cette scène montre Lisa en train de prendre son bain, puis après quelques instants l’eau s’arrête de couler. On entend des sons incohérents et on comprend que le flot de l’eau s’est arrêté. Donc l’écoulement de l’eau ne se passe pas là où il faut, mais tout au contraire, dans les endroits les plus absurdes, à comparer avec la vie ordinaire bien sûr, et non dans le monde que crée Tarkovski.

On remarque que, même les passages pris de la mémoire collective et des reportages de la guerre mondiale choisis, se déroule à proximité de l’eau ou dans les étendues. On voit, par exemple, vers une heure du film, les soldats avançant dans l’eau, pour déplacer leurs équipements et aboutir à leur destination; encore une fois, l’eau, cet élément étrange, est le catalyseur qui permet l’interaction entre le monde de la mémoire collective et celui du monde présent.

Dans Nostalghia, la scène de Gortchakov seul dans la chambre d’hôtel montre l’eau comme élément omniprésent. On le remarque à travers la fenêtre, où on voit la pluie tomber, et aussi à travers la réflexion de l’eau, coulant sur les vitres, sur le mur de la chambre, à gauche du cadre, et sur le mur de la toilette, à droite du cadre. Mais c’est surtout l’eau sur le sol, et qui rentre de la fenêtre ouverte, qui est remarquable et même alarmante. Ce flot est en train d’envahir la chambre. Gortchakov a ouvert la fenêtre pour laisser l’eau de la pluie, le vent et la lumière rentrer dans la chambre. Quand la caméra s’approche de Gortchakov, on aperçoit le lit dans l’ombre et le reflet de l’eau, sur le mur derrière lui, jusqu’à ce que la caméra s’arrête de bouger. On a alors un gros plan de l’acteur là où la lumière change d’une ombre sombre à une lumière, qui est le miroitement de l’eau sur son visage. La réflexion de la pluie dans la chambre créé un mouvement sur les murs. L’action est lente mais, par rapport aux autres mouvements dans ce plan, elle est distinctement plus rapide. Ce mouvement implique le temps; c’est comme si les murs de la chambre sont l’écran là où est transféré le mouvement des gouttes de pluies, un mouvement indéfini, là où est projeté le temps. L’eau de pluie par terre et qui s’est faufilée par la fenêtre ouverte, est en train d’occuper de plus en plus d’espace. Son mouvement est très lent mais très claire, et c’est ce mouvement aussi qui transmet la notion du temps. Plus le lien sensori-moteur diminue plus on devient attentif au petit mouvement, comme l’explique Deleuze. L’eau est donc présente, à travers la réflexion, sur les murs à l’intérieur de la chambre, sur les vitres de la fenêtre, à l’extérieur, par terre devant la fenêtre, et même sur le visage de Gortchakov qui semble être constitué d’eau.

Le son des averses est aussi très présent, dans beaucoup de scènes, sous forme de pluie, ou le son d’égouttement amplifié de l’eau. Par exemple, la scène à l’intérieur de la maison de Domenico, ou le sol est devenu presque submergé. Tout est saturé d’eau, même au-dessus de son lit. On voit pareillement, un sac en plastique renfermant un grand volume d’eau; l’eau est devenu l’élément le plus accaparant de cet espace. La présence du bruit de ruissellement d’eau ainsi que la résonnance, des gouttes d’eau, est très remarquable dans la plupart des films de Tarkovski, que ce soit dans le monde quotidien, ou dans l’autre monde, l’univers excentrique. Ce cinéaste abuse de cet élément en image et en sonorité, pour combler l’espace et le transcender.

Domenico, en prêchant sur la statue de Marc-Aurèle, au milieu de la place du Capitole, et avant de s’immoler par le feu, confit à Gortchakov une mission. Pour pouvoir sauver l’humanité il va falloir traverser la piscine du bain thermal de Bagno Vignoni asséchée portant une bougie allumée à la main. Après la première tentative, Gortchakov revient au point de départ, car la bougie s’éteint. A mi-chemin, au second passage, un souffle de vent étouffe le feu fragile de la bougie; il revient une fois de plus au point de départ. Ce n’est qu’au troisième essai qu’il arrive au côté opposé et pose la bougie allumée sur le bord de la piscine, qui, pour lui, devient un autel. Epuisé il souffre d’une crise cardiaque et meurt. On comprend ce plan distinctif de neuf minutes, presque complètement silencieux, si on applique la théorie de Domenico, qui dit que dans chacun nous il y a l’eau et le feu. Dans ce plan il y a un déséquilibre visible, l’eau est manquante, le bassin est vide. L’existence du feu concrétisée par la bougie est présente sans son antagoniste, l’eau, donc la vie de Gortchakov n’est plus possible, sa mort est justifiée. D’après Domenico pour sauver le monde il faut payer le prix ultime, il faut se sacrifier. L’eau devient un élément étrange et essentiel dans le monde de Tarkovski sans lui la vie des caractères est insoutenable.

On voit dans Stalker (20 ème  min), de l’eau par terre. Le sol est inondé de ce qui semble de l’eau de pluie, des flaque d’eau et de boue partout sur le chemin des personnages, en sortant du bar. On aperçoit aussi, vers la trente et unième minute, les protagonistes, fuyant une attaque, se cachent dans une usine noyée. Les caractères ont dû patauger dans l’eau, pour pouvoir se déplacer et rentrer dans la zone interdite, là où il découvre une locomotive à l’aide de laquelle il pourront se déplacer. Plus loin, après presque une heure du film, on perçoit des flots jaillissant des arcades derrière et entourer les trois compagnons qui ont eu du mal pour pouvoir continuer leur route. Quelques minutes plus tard, les héros s’allongent par terre encerclés par l’eau comme s’ils sont sur une petite ile. L’atmosphère submergé est adéquate au passage vers le second monde, donc on les voit dormir et rêver. Leur monde physique est constitué en grande majorité d’eau. Cet élément devenu envahissant et bizarre est nécessaire, même obligatoire dans l’univers Tarkovtien, puisqu’il permet ce passage. On remarque que les caractères ne sont pas endormis mais plutôt en état de transe. Encore plus loin, sur leur passage dans le tunnel, il y a l’eau ruisselante du toit, tout au long du chemin qui les mène vers l’endroit isolé. Même à l’issu de ce trajet, ils doivent faire une traversée dans une petite mare. L’écrivain dort dans l’eau à côté du trou du puit, comme si c’était habituel pour les gens de dormir dans des étendues mouillées. L’eau est l’élément transcendant, il faut que les protagonistes soient en contact directe avec l’eau pour être connecter avec l’autre monde. On est pris par une impression du sacré et du mystique. Cet élément devient alors essentiel; sans lui la formule que crée le cinéaste n’est plus valable. Et voilà que, vers la cinquante huitième minute, au seuil de la chambre la plus vénérable, l’eau sature le sol.

Vers la fin de cet œuvre, on fait face, encore une fois, à la polyvalence de cette matière. On voit, dans un plan rapproché de l’eau, que cet élément est attaqué par une tache noire huileuse qui parvient, graduellement à changer la nature de cet élément. Ce plan étrange met en relief les deux natures divergentes; l’eau et l’huile sont les représentants des deux mondes.

La dernière observation se fera sur le film Sacrifice, quand on voit Maria laver les mains d’Alexander avec de l’eau, et on comprend que cette matière est voulue essentielle, et toujours présente dans le quotidien des personnages. Le contact qui se fait entre ces deux, permets aux individus de pouvoir se connecter avec le second monde. Le même exemple se répète dans Solaris, vers la fin du métrage. Le lien entre Chris et Hari, sa femme décédée, est l’eau, car on la voit également lui laver sa main blessée, comme dans le plan mentionné plus tôt.

Symbole de pureté, matière sacrée ou élément transitoire, quelle que soit l’interprétation attribuée à l’eau, son importance dans les films de Tarkovski, ainsi que son étrangeté sont indéniables.

Conclusion

Quand on demanda Tarkovski à propos de l’abondance de l’eau dans ses films il répliqua que cet élément est une représentation directe de la nature, une réponse plutôt générale et ambiguë. Il dit aussi qu’il pleuvait fortement chez lui en Russie quand il était petit, et spécifia qu’il n’aimait pas la mer car elle est trop vaste et monotone, qu’il aimait les ruisseaux, les petites choses, et donna l’exemple des Japonais concernant la nature. Il ajouta que cette société se concentre sur un espace cloîtré mais qui reflète l’infini. Pour ce cinéaste l’eau est mystérieuse et rien n’est plus beau que cet élément. Il parla de certaines de ces propriétés physiques: ‘Elle est très ciné génique, elle transmet le mouvement, la profondeur les changements.’

L’eau est omniprésente dans tout l’œuvre de Tarkovski. L’eau chez ce cinéaste touche à plusieurs de nos sens, et à l’ouïe même plus qu’au visuel. Tarkovski use l’image et le son pour immerger les scènes de cet élément transcendant.

Bibliographie

AUMONT J. (2003). L’objet cinématographique et la chose filmique. Cinémas 14-1.

BACHELARD G. – (1942) L’eau et les rêves. Paris: José Corti.

BERGÉ C. (2011). Tarkovski: chroniques de l’incertitude. Philosophes et philosophie au cinéma in Mag philo. Été 2011.  URL: http://www.cndp.fr/magphilo/index.php?id=124

JUNG C. G. (1950). Métamorphoses de l’âme et ses symboles. Paris: Le Livre de Poche.

HERVÉ-BAZIN C. (2009) Femme, eau et développement durable: de l’invisible au visible. Thèse de doctorat en Sciences de l’information et de la communication, non publiée. Université de Paris IV Sorbonne – CELSA., Paris.

PICHON M. (2015). « L’eau et les rêves ». Quelques clés pour la lecture. URL: https://gastonbachelard.org/wp-content/uploads/2015/07/L-Eau-et-les-reves_M.PICHON.pdf

[1] – doctorant à l’université du Saint esprit kaslik.

[2] G. Bachelard, 1942, L’eau et les rêves. Essai sur l’imagination de la matière. P17.

[3] G. Bachelard, 1942, L’eau et les rêves. Essai sur l’imagination de la matière. P21.

[4] Tarkovski, A. (1975). Le Miroir, 01:28:50.

[5] Tarkovski, A. (1975). Le Miroir, 00:32:19.

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